Katherine L. Turner, Leigh Senderowicz et Heather M. Marlow, Ipas, 2016.
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Summary:
Ipas conducted a situational analysis in Benin, Burkina Faso, Senegal and Togo to better understand the needs and opportunities for supporting comprehensive abortion care in Francophone West Africa. This document presents the findings of this analysis.
Introduction
L’avortement non sécurisé représente un défi de santé mondiale qui entraine chaque année le décès d’approximativement 47 000 femmes1 et entraine des séquelles graves chez cinq millions d’autres femmes. C’est la région de l’Afrique de l’Ouest qui est la plus fortement touchée par ce problème. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime à plus de 1,8 millions le nombre d’avortements non sécurisés pratiqués chaque année en Afrique de l’Ouest, avec un taux de décès de 540 pour 100 000 avortements, ce qui représente de loin le taux le plus élevé au monde. Les pays d’Afrique de l’Ouest francophone ont été tout particulièrement oubliés par les donateurs et les partenaires du développement qui ont eu tendance à se focaliser sur les pays anglophones.
En Afrique de l’Ouest francophone, les efforts ont été avant tout concentrés sur les soins après avortement (SAA), une stratégie qui consiste à traiter les complications consécutives aux avortements incomplets et non médicalisés déjà en cours, alors que très peu d’efforts sont directement consacrés à la prise en charge de l’avortement induit et sécurisé. Ipas a mené sur place une analyse situationnelle de mars à mai 2015 dans le but de mieux comprendre les besoins et les opportunités pour une prise en charge des soins complets d’avortement en Afrique de l’Ouest francophone.
Comme première étape dans le cadre de cette analyse situationnelle, Ipas a examiné à la loupe l’environnement contextuel des pays suivants, Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Niger, Sénégal et Togo. Par la suite, et après avoir constaté qu’il y avait dans certains pays des indications d’un mouvement positif et d’un climat progressivement plus propice à une prise en charge complète des soins d’avortement, le champ d’étude a été réduit au Bénin, au Burkina Faso, au Sénégal et au Togo. Des études documentaires détaillées ont été effectuées sur chacun de ces quatre pays, et des visites ont eu lieu au Bénin et au Togo.
Conclusions régionales
L’analyse situationnelle a démontré, malgré certains obstacles conséquents, l’existence de pistes encourageantes susceptibles de favoriser une prise en charge des soins complets d’avortement en Afrique de l’Ouest francophone. Tous les pays inclus dans cette analyse ont signé un certain nombre de traités importants relatifs à la promotion des droits de la femme, et notamment le Protocole de Maputo, qui incluent spécifiquement la mise à disposition en toute légalité de soins d’avortement sécurisé.
Nombre de pays cités plus haut ont adopté des dispositions permettant la légalisation de l’avortement dans le but de protéger la vie et la santé de la femme ou en cas de viol. Dans la plupart des cas cependant, ces dispositions juridiques n’ont pas été transposées dans la réalité en soins concrets et accessibles aux femmes.
Recommandations
Sur la base des constatations de cette analyse situationnelle, nous recommandons que les actions suivantes soient entreprises :
- Établir un dialogue avec les gouvernements en vue de renforcer leur engagement à assurer une prise en charge aussi exhaustive que possible des soins complets d’avortement.
- Établir un dialogue avec les bailleurs pour leur demander d’augmenter leur appui aux programmes visant à la prise en charge de soins d’avortement dans les pays d’Afrique de l’Ouest francophone.
- Promouvoir une meilleure compréhension des législations locales en matière d’avortement ainsi que des processus des ministères de la Santé nécessaires à la mise en application de ces législations.
- Soutenir l’élaboration, l’adoption et la mise en œuvre des textes d’application ainsi que l’élaboration de normes et de protocoles, et leur intégration aux autres directives en matière de santé de la reproduction, de manière à ce que les lois et les politiques en vigueur sur l’avortement et la santé reproductive puissent être appliquées dans leur intégralité. Au Bénin, plus spécifiquement, le document Avortement médicalisé : Guides et standards de 2011, doit être révisé, adopté et très largement diffusé au sein du système de santé auprès des fonctionnaires, des responsables et des prestataires de soins.
- Établir des partenariats avec des organisations locales en vue d’organiser la diffusion et l’explication de la loi, des politiques et des normes et directives sur l’avortement de manière à ce que les prestataires de soins, les femmes et toutes les autres parties prenantes connaissent les conditions juridiques, les directives relative à la prestation de services et les droits de la femme en matière de soins liés à l’avortement.
- Mettre en place des interventions de clarification des valeurs et de transformation des attitudes (CVTA) afin de renforcer les connaissances, les attitudes et l’appui visant à favoriser une prise en charge accrue et un meilleur accès aux soins complets d’avortement.
- Établir des partenariats avec des organisations locales afin de soutenir et susciter des défenseurs et activistes locaux capables de sensibiliser le public et renforcer l’adhésion en faveur de la prise en charge de soins complets d’avortement, et capables aussi de demander au gouvernement de rendre des comptes sur l’accès et la mise à disposition de soins de qualité dans ce domaine.
- Soutenir les efforts visant à étendre les soins complets d’avortement et poursuivre l’expansion des soins après avortement, à tous les niveaux des systèmes de santé de manière à garantir un accès aux soins à toutes les femmes dans le cadre de programmes élargis et intégrés de santé sexuelle et reproductive.
- S’assurer que des mécanismes permettant un approvisionnement durable et régulier de produits et équipements de santé sexuelle et reproductive soient dument mis en place.
Même si l’opposition culturelle, religieuse et politique à la prise en charge de soins complets d’avortement reste importante dans certaines circonstances, on constate des opportunités clairement prometteuses qui pourraient permettre d’étendre la prise en charge complète de l’avortement pour que les femmes qui vivent en Afrique de l’Ouest francophone puissent bénéficier des soins dont elles ont besoin et auxquels la loi leur donne droit.
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