« Etre une femme ne se résume pas à gérer une maison, nous sommes plus que cela… »
Extraits de l’entretien
« Il y a beaucoup de freins qui empêchent les femmes de réaliser leurs rêves… »
« Il y a de la discrimination. Il y a beaucoup de freins qui viennent de notre société et de notre culture. Il y a des moments où nous sommes obligées de nous sacrifier, de mettre de côté nos aspirations parce que, en tant que femmes, nous avons le devoir de rester à la maison.
C’est très compliqué lorsqu’on est mariée d’allier vie professionnelle, vie d’épouse et de mère.
C’est très compliqué, lorsqu’on est mariée d’allier vie professionnelle, vie d’épouse et de mère. Quand je me suis mariée, j’ai considérablement réduit mes activités. Même si mon mari est très compréhensif, de nombreux facteurs faisaient que je ne pouvais plus être aussi active qu’avant. Je me dis que si c’était un homme, cela aurait été plus facile. »
« Tout repose sur les femmes…»
« J’ai l’habitude de dire que tout repose sur les femmes. C’est inné en nous cette capacité d’innovation, cet esprit de responsabilité et aussi ce don à essayer de tout gérer. Par exemple, si on compare la journée d’un garçon et d’une fille, en plus d’aller à l’école, il y a tout un travail invisible que les filles font à la maison.
Si on compare la journée d’un garçon et d’une fille, en plus d’aller à l’école, il y a tout un travail invisible que les filles font à la maison
Cet aspect est tellement ancré en nous que, quel que soit notre niveau d’instruction, on ne peut pas refuser de s’acquitter de certaines tâches qui nous sont déléguées en tant que femmes, parce que nous avons été éduquées ainsi. Finalement, c’est comme s’il n’y avait que cela, alors que nous sommes bien plus que cela. Il faudrait qu’on arrête de limiter les femmes et qu’on les aide à atteindre leurs objectifs dans la vie. »
« Les filles ont tendance à plus se sacrifier pour la famille… »
« Au-delà de la situation sociale, il y a aussi le problème des grossesses et des mariages précoces. Certaines femmes se marient tôt parce qu’elles subissent une pression sociale. Pour leur entourage, une jeune fille n’a pas besoin de faire des études poussées mais elle doit trouver un mari et fonder une famille.
Les victimes gardent ces abus en elles et n’en parlent pas
La situation économique a aussi un grand impact sur le maintien des filles à l’école et leur épanouissement au plan professionnel et social. Les filles ont tendance à plus se sacrifier. Quand il y a un choix à faire dans la famille pour subvenir aux besoins, en général c’est la fille qui se sacrifie, c’est elle qui arrête ses études pour aller travailler. »
« Le harcèlement est très courant même si on ne s’en rend pas compte… »
« Lorsque je travaillais dans le milieu associatif de jeunes, je constatais souvent des cas d’abus et d’harcèlement. Le harcèlement est très courant même si on ne s’en rend pas compte. Ce sont des situations que nous vivons tout le temps dans les transports en commun, les bus… Cela m’est arrivé, je me suis sentie souillée. Ce sont des choses qui après ont un impact sur la vie de la personne. Les victimes gardent ces abus en elles et n’en parlent pas. »
« Il faut que toutes les conditions soient réunies pour que chaque jeune fille puisse réaliser son rêve… »
« Je voudrais qu’on porte une attention particulière aux jeunes filles, qu’on puisse les accompagner de tel sorte qu’elles puissent réaliser leurs rêves. Elles ont de grandes capacités et un potentiel énorme. Il faudrait que toutes les conditions soient réunies pour que chaque jeune fille puisse réaliser son rêve. Il faut les accompagner pour qu’elles aillent et restent à l’école. Pour ce faire, l’environnement familial doit aussi être pris en compte.
Il faut également lever le voile du silence par rapport aux violences basées sur le genre. Je m’adresse plus aux populations ; c’est à nous d’aider les décideurs sur cette question. »
« Le changement que nous voulons voir autour de nous doit d’abord commencer en nous-mêmes »
« Les femmes doivent arrêter de se “victimiser”. Elles ont tendance à se mettre des barrières elles-mêmes et de se conformer à ce qu’on leur attribue comme rôle dans la société. J’ai l’habitude de dire “je suis une femme mais je suis forte et fière de l’être”. Je ne me laisse pas faire. Je me fixe des objectifs et je fais tout pour les atteindre.
Il faut également lever le voile du silence par rapport aux violences basées sur le genre
C’est quand tu te respectes et que tu te mets en valeur que les autres ont plus tendance à te respecter et à te mettre en valeur. Donc, le changement que nous voulons voir autour de nous doit d’abord commencer en nous-mêmes. Il faut qu’on se respecte et qu’on se mette en valeur pour que les autres puissent avoir cette attitude envers nous.»
Photo : WATHI
Sokhna Aminatou Sarr est journaliste de formation, elle a une licence en journalisme et communication. Elle est titulaire d’un second cycle à l’Ecole nationale des travailleurs socio-spécialisés avec un diplôme supérieur en travail social. Elle est très engagée dans le milieu associatif surtout pour venir en aide aux enfants issus des milieux défavorisés