Évaluation de la corruption au Sénégal
Agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID), 2007.
http://pdf.usaid.gov/pdf_docs/Pnadk549.pdf
FRANÇAIS
La corruption constitue un fléau de grande ampleur au Sénégal de nos jours. Ce phénomène est présent aussi bien au niveau des transactions quotidiennes avec les agents de la fonction publique (petite corruption) que dans le cadre de la passation d’importants marchés d’États (grande corruption).
Ces pratiques conduisent à la mauvaise affectation des ressources, à l’aggravation de la pauvreté chronique et à l’accentuation de la distance entre les citoyens et l’Etat. Les bailleurs de fonds et les acteurs locaux sénégalais ont augmenté la pression pour plus de transparence et pour la réalisation de plusieurs réformes administratives en vue de réduire ce phénomène.
En 2000, le gouvernement de Wade avait nourri l’espoir de renforcer la transparence dans l’action publique en vue d’éradiquer la corruption. Ces grandes attentes n’ont pas été réalisées. Malgré la création de nouvelles institutions en vue de promouvoir la bonne gouvernance et combattre la corruption, notamment le Programme National de Bonne Gouvernance (PNBG), la Commission de lutte contre la non-transparence, la corruption et la concussion (CNLTCC), ces institutions ont eu très peu d’impact sur l’amélioration de la transparence et la réduction de la corruption.
La corruption emprunte différentes formes et l’éradication du phénomène reste complexe. Le Sénégal est un pays où d’importants droits démocratiques ont évolué et sont exercés. Une analyse profonde du cadre juridique et institutionnel au Sénégal révèle que plusieurs bonnes lois et institutions ont été instaurées.
Cependant, plusieurs de ces lois et institutions comportent des insuffisances et des limites, et sont destinées à maintenir la prédominance du pouvoir exécutif. Ce faisant, très peu des contre-pouvoirs existent face aux abus du pouvoir exécutif, et très peu de dispositions existent aussi pour permettre d’assurer l’autonomie des institutions de régulation.
La présente étude vise à identifier les problématiques-clés et la vulnérabilité à la corruption dans les politiques publiques en général, mais aussi au sein des secteurs et services administratifs spécifiques et des acteurs non-étatiques. La compréhension de ces problématiques va permettre à l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) dans sa vision stratégique de formuler un ensemble d’options en termes de programmes afin de définir sa propre approche pour la réduction de la corruption au Sénégal.
Il existe un certain nombre de facteurs qui facilitent la non-transparence et la corruption dans la gouvernance au Sénégal (la faiblesse des mécanismes de reddition, la politisation de la bureaucratie d’État et La tolérance publique et l’acceptation généralisées de la corruption).
Le rapport identifie quatre problèmes majeurs qui ont besoin d’être résolus pour une amélioration considérable de la gouvernance et une réduction du comportement de corruption. Ce sont :
- Le modèle très centralisé (concentration des pouvoirs par la présidence) dans la prise de décision, conduisant à la faiblesse de contre-pouvoirs dans les décisions de l’exécutif.
- Le manque de transparence des actions gouvernementales et le manque d’autonomie des institutions de contrôle et de régulation chargées d’assurer le suivi des dépenses publiques.
- Le manque d’éthique professionnelle dans les prestations de services publics
- L’opposition publique inadéquate et inefficace face à la corruption
Les options retenues pour lutter contre la corruption dans les programmes de l’USAID sont :
- Explorer la possibilité d’enrôler le soutien des autorités religieuses sénégalaises pour mener des programmes contre la corruption, tout particulièrement ceux qui traitent de la petite corruption.
- Travailler sur des études avec le Forum Civil dans le secteur de l’éducation et AID Transparency. Les médias pourraient être associés dans la diffusion de ces études.
- Faire participer les citoyens dans toutes les phases du processus budgétaire. Cela favorise une plus grande transparence et confiance dans l’administration locale et contribue à prévenir ou à diminuer la petite corruption dans les opérations de l’administration locale et la fourniture de services publics.
- Faire accepter les programmes de bonne gouvernance dans les différents secteurs (santé, éducation) pour qu’ils soient des éléments de la participation communautaire dans la gestion et les contrôles financiers.
- Travailler avec les associations pour évaluer l’impact négatif de la corruption et du manque de transparence dans la vie professionnelle.
- Créer un observatoire indépendant pour surveiller les contrats publics et publier les résultats.
- Soutenir et surveiller le travail de l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP) une structure tripartite qui comprend le gouvernement, la société civile et le secteur privé pour surveiller a posteriori les contrats.
ENGLISH
Corruption is a widespread scourge in Senegal today. This phenomenon is present both in daily transactions with the public servants (small corruption) and in important procurement activities (big corruption).
These practices lead to the misallocation of resources, the worsening of chronic poverty and a heightened distance between citizens and the state. Donors and senegalese local actors have increased the pressure for more transparency and for the realization of several administrative reforms to reduce this phenomenon.
In 2000, the government of Wade had nurtured the hope of enhancing transparency in public action to eradicate corruption. These high expectations have not been realized. Despite the creation of new institutions to promote good governance and combat corruption – such as the Programme National de Bonne Gouvernance (National Good Governance Program), the Commission de lutte contre la non-transparence, la corruption et la concussion (Commission for the fight against non-transparency, corruption and bribery) –, these institutions have had little impact on improving transparency and reducing corruption.
Corruption takes various forms and the eradication of the phenomenon remains complex. Senegal is a country where significant democratic rights have evolved and are exercised. A deep analysis of the senegalese legal and institutional framework reveals that many good laws and institutions are in place.
However, many of these laws and institutions have shortcomings and limitations, and are intended to maintain the predominance of the executive branch. In doing so, a system of checks and balances barely exist to counter the abuse of the executive branch, and few provisions exist to help ensure the autonomy of regulatory institutions.
This study aims to identify key issues and vulnerability to corruption in public policy, but also within specific sectors, administrative services and non-state actors. Understanding these issues will enable the United States Agency for International Development (USAID) in its strategic vision to formulate a set of options in terms of programs in order to define its own approach for reducing corruption in Senegal.
There are a number of factors that facilitate non-transparency and corruption in governance in Senegal (weak accountability mechanisms, politicization of the state bureaucracy, public tolerance and widespread acceptance of corruption).
The report identifies four major problems that need to be solved for a considerable improvement of governance and a reduction of corrupt behavior. Those are :
- The highly centralized model (concentration of power in the presidency) in decision-making, leading to the weakness of checks and balances in the decisions of the executive.
- The lack of transparency of government actions and the lack of autonomy of the regulatory institutions entrusted with the monitoring of public expenditure.
- The lack of professional ethics in delivering public services
- The inadequate and inefficient opposition of the public to corruption
The options selected in the fight against corruption in USAID programs are:
- Explore the possibility of enlisting the support of Senegalese religious authorities to conduct programs against corruption, especially those dealing with small corruption.
- Work on studies with the Civil Forum in the area of education and AID Transparency. The media could be involved in the dissemination of these studies.
- Involve citizens in all phases of the budget process. This promotes greater transparency and trust in the local administration and helps to prevent or reduce small corruption in the operations of the local administration and the provision of public services.
- Make good governance programs in various sectors (health, education) accepted so that they are elements of community participation in the management and control of finances.
- Work with the associations to evaluate the negative impact of corruption and lack of transparency in work.
- Create an independent observatory to monitor public contracts and publish the results.
- Support and monitor the work of the Agence de régulation des marchés (Public Procurement Regulatory Authority), a tripartite structure that includes the government, civil society and the private sector to monitor the contracts a posteriori.
Les Wathinotes sont soit des résumés de publications sélectionnées par WATHI, conformes aux résumés originaux, soit des versions modifiées des résumés originaux, soit des extraits choisis par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au thème du Débat du mois. Lorsque les publications et leurs résumés ne sont disponibles qu’en français ou en anglais, WATHI se charge de la traduction des extraits choisis dans l’autre langue. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.
The Wathinotes are either original abstracts of publications selected by WATHI, modified original summaries or publication quotes selected for their relevance for the theme of the Debate of the Month. When publications and abstracts are only available either in French or in English, the translation is done by WATHI. All the Wathinotes link to the original and integral publications that are not hosted on the WATHI website. WATHI participates to the promotion of these documents that have been written by university professors and experts.