Wathinote Constitution : Burkina Faso
La Constitution du Burkina Faso compte 15 titres comprenant 173 articles en 9 676 mots. Adopté par référendum le 3 juin 1991, ce texte de portée générale a connu plusieurs modifications dont la plus récente date de 2012.
Droits, devoirs et garanties
La Constitution du Burkina Faso reconnaît la dichotomie « droits et devoirs » dans une configuration plus détaillée que dans les autres constitutions. Quatre catégories de droits et devoirs sont citées :
Les droits et devoirs civils sont l’égalité en droits, la prohibition des discriminations; la garantie de la protection de la vie, la sureté et l’intégrité physique; l’interdiction des traitements dégradants (esclavage, torture); l’égale protection de la loi, la présomption d’innocence; l’individualité de la peine, l’inviolabilité du domicile, de la correspondance et de la vie privée. Font également partie des droits et devoirs civils: les libertés de croyance, de non croyance, de conscience, d’opinion religieuse, de culte, de réunion, cortège et manifestation; d’opinion, de presse et le droit à l’information.
Les droits et devoirs politiques sont la participation à la gestion des affaires de l’État et de la société, la création libre des partis et formations politiques. Les droits et devoirs économiques sont la propriété des ressources naturelles par le peuple et leur usage pour l’amélioration des conditions de vies, le droit à la propriété, la liberté d’entreprise et l’obligation de s’acquitter de ses devoirs fiscaux. Les droits et devoirs socio-culturels concernent l’éducation, l’instruction, la formation, le travail, la sécurité sociale, le logement, le sport, les loisirs, la santé, la protection de la maternité et de l’enfance, l’assistance aux personnages âgées ou handicapées, les libertés syndicales et d’association.
La principale garantie à ces droits et devoirs est la loi. Si la Constitution n’évoque explicitement pas un mécanisme de saisine par les citoyens des cours pour cause de violation des droits, il est reconnu au pouvoir judiciaire la responsabilité de veiller au respect des droits et libertés définis dans le texte constitutionnel. Le Conseil constitutionnel qui statue sur la constitutionnalité des lois et ordonnances, peut soit s’autosaisir, ou être saisie si une disposition porte atteinte aux droits et libertés. Cette saisine est limitée aux acteurs institutionnels (Le Président, le Premier ministre, les présidents des deux chambres du Parlement et un dixième de chacune des chambres).
Toutefois, il est reconnu aux citoyens un droit d’initiative ou d’action collective sous forme de pétition contre des actes : « lésant le patrimoine public; lésant les communautés sociales et portant atteinte à l’environnement et au patrimoine culturel ou historique ». Il convient de préciser que la garantie de la loi concerne majoritairement les catégories civile, politique et économique. Hormis les libertés syndicales et d’association, la Constitution n’évoque pas de garantie explicite pour les droits et devoirs sociaux et culturels. Dans une démarche positiviste, la loi fondamentale assigne à l’État la tâche de les promouvoir.
Références :
Titre I: Articles 1-30
Titre XIV : Article 154
Organisation politique
Pouvoir et prérogatives du Président
Le système politique burkinabé se caractérise par la primauté du Président, chef de l’exécutif, chef des Armées et qui est également à la tête du Conseil supérieur de la magistrature. Le Président du Burkina Faso fixe les grandes orientations de la politique de l’État qui sont mises en œuvre par le gouvernement. Il nomme le Premier ministre et les autres membres du gouvernement. La dyarchie apparente au sein de l’exécutif, visible dans les autres constitutions est ici absente. Le Président peut dissoudre le gouvernement en évoquant « l’intérêt supérieur de la nation », sans que l’initiative ne provienne du Premier ministre.
La primauté de l’exécutif est légèrement contrebalancée par quelques dispositions renforçant le rôle du Parlement : l’obligation faite au Président de choisir son Premier ministre au sein de la majorité parlementaire, la destitution du Premier ministre par le Président si la déclaration de politique générale n’obtient pas la majorité absolue au Parlement.
Le pouvoir législatif
Le pouvoir législatif est exercé par l’Assemblée nationale et le Sénat. L’Assemblée nationale est composée de 127 députés élus au suffrage universel direct.
Le Sénat représente les collectivités territoriales, les autorités coutumières et religieuses, le patronat, les travailleurs, les Burkinabè vivant à l’étranger et les personnalités nommées par le Président de la République. Le Sénat compte 89 membres : 29 sénateurs nommés par le Président de la République ; 39 sénateurs dont trois par région ; seize sénateurs dont quatre pour les autorités coutumières et traditionnelles, quatre pour les autorités religieuses, quatre pour les organisations syndicales de travailleurs et quatre pour les organisations reconnues du patronat burkinabè ; cinq sénateurs élus représentant les Burkinabè vivant à l’étranger. Le Sénat est prioritaire dans l’examen des projets de lois portant sur l’organisation des collectivités locales et les Burkinabé de l’étranger. Il statue en dernier ressort sur ces projets de lois en cas de désaccord avec l’Assemblée nationale.
Le pouvoir législatif « contrôle l’action du gouvernement, vote la loi et consent l’impôt ». Le domaine de la loi est précisément délimité dans la Constitution. Il couvre notamment la définition des règles de : la citoyenneté, les droits civiques et l’exercice des libertés publiques ; la promotion du genre ; l’organisation des tribunaux judiciaires et administratifs et la procédure devant ces juridictions, le statut des magistrats ; le régime électoral du Sénat, de l’Assemblée nationale et des assemblées locales. Le Parlement définit entre autres les principes fondamentaux de : l’organisation générale de l’administration ; le statut général de la fonction publique ; la protection de la liberté de presse et de l’accès à l’information ; la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources.
L’initiative des lois est partagée avec le pouvoir exécutif. Les outils de contrôle parlementaire sur l’action de l’exécutif sont les questions orales et écrites ainsi que les commissions d’enquête parlementaire. Le contrôle des finances publiques est du ressort de la Cour des comptes que le Parlement peut charger d’enquêtes et études sur l’exécution de la loi des Finances. Les modalités de ce contrôle budgétaire ne sont cependant pas explicitées alors que l’indépendance de la Cour des comptes par rapport au pouvoir exécutif n’est pas affirmée.
Le pouvoir judiciaire
Le pouvoir judiciaire est exercé par la Cour de cassation, le Conseil d’État, la Cour des comptes, le Tribunal des conflits ainsi que les cours et tribunaux institués par la loi. Le principe d’indépendance du pouvoir judiciaire s’illustre par l’inamovibilité des juges et leur soumission à la seule autorité de la loi. Cette indépendance est cependant relative.
- Le Conseil supérieur de la magistrature
Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) est en effet présidé par le Président de la République, le premier vice-Président étant le ministre de la Justice, le second vice-Président le premier Président de la Cour de cassation. Si le CSM fait des propositions sur les nominations et affectations des magistrats des Hautes Cours, seul son avis est requis pour les autres nominations de magistrats qui relèvent du ministre de la justice, donc du pouvoir exécutif.
- La Haute Cour de justice
La Haute Cour de justice est compétente pour juger le Président de la République pour des faits constitutifs de haute trahison, d’attentat à la Constitution et détournement de deniers publics. Elle statue également sur les faits qualifiés de crimes ou délits commis par les membres du gouvernement durant l’exercice de leurs fonctions. La mise en accusation du Président est votée à la majorité des 4/5 des députés de l’Assemblée nationale tandis que celle des membres du gouvernement est votée à la majorité de deux tiers des voix. La Haute Cour de justice est composée de six députés élus par l’Assemblée nationale et de trois magistrats de grade exceptionnel choisis par le Président de la Cour de cassation. Elle élit son président parmi ses membres.
Le Conseil constitutionnel
Le Conseil constitutionnel a une double compétence. D’une part, il statue sur la constitutionnalité des lois, règlements et traités internationaux, sur les conflits de compétences entre pouvoirs législatif et exécutif et il répond également aux requêtes d’interprétation de la Constitution. D’autre part, il est l’organe de contrôle de la régularité des scrutins présidentiel et législatif. Il est en conséquence juge du contentieux électoral.
La composition du Conseil constitutionnel n’atteste pas d’une indépendance totale vis à vis du pouvoir exécutif : six membres sont en effet nommés par le Président (trois magistrats sur proposition du ministre de la Justice et trois personnalités dont au moins un juriste) ; trois membres (dont au moins un juriste) respectivement désignés par les Présidents des deux chambres du Parlement. Par ailleurs, les anciens Chefs d’État sont membres de droit du Conseil. Le Président du Conseil constitutionnel est élu par les membres en son sein. Les membres sont élus pour un mandat unique de neuf ans, ce qui témoigne d’une volonté de les rendre indépendants.
Le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président de la République, le Premier ministre, le Président de l’Assemblée nationale , le Président du Sénat et un minimum d’un dixième des membres de chaque chambre du Parlement. Une question de constitutionnalité peut être renvoyée au Conseil constitutionnel par la Cour de cassation ou le Conseil d’État lorsqu’il apparaît qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Loi fondamentale. Il est à préciser que le Conseil peut s’autosaisir de toute question relevant de sa compétence.
Contrôle de l’administration
Le pouvoir exécutif est prépondérant, le Président nomme aux emplois civils et militaires en Conseil des ministres. Toutefois, Il est prévu une loi « définissant les conditions dans lesquelles le pouvoir de nomination du Président nécessite un avis de l’Assemblée Nationale ». En dépit de son caractère succinct, cette ambition d’encadrement du pouvoir de nomination par l’Assemblée est inédit dans les pays d’Afrique francophone. Par ailleurs, la révision constitutionnelle de 2012 a constitutionnalisé l’existence du Médiateur – autorité indépendante existant depuis 1994. Le Médiateur du Burkina Faso est un organe intercesseur entre l’administration et les citoyens. Une loi organique en fixe les attributions et définit son fonctionnement.
Références :
Titre I: Articles 1-30
Titre III : Articles 32-56
Titre V : Articles 78-85
Titre VIII : Articles 124-136
Titre IX : Articles 137-140
Titre XIV : Articles 152-160
Animation de la vie politique
Régulation des partis politiques
Les partis politiques sont reconnus comme concourant à l’expression du suffrage. Leur création est reconnue et garantie par la Constitution. Les partis créés sur une base régionale, confessionnelle, raciste et/ou tribaliste sont interdits. Le Conseil constitutionnel est en charge de la régulation des partis politiques dans le respect des conditions sus mentionnées.
Élections
- Organisation et contrôle des élections
Le Conseil constitutionnel est également en charge du suivi et du contrôle de la régularité des consultations électorales au niveau national (élections présidentielles et législatives). Il statue sur le contentieux et proclame les résultats. Le suivi et le contrôle des élections locales sont du ressort des tribunaux administratifs qui statuent sur le contentieux tandis que le Conseil d’État en proclame les résultats définitifs.
- Modes d’élection
Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois. Les membres de l’Assemblée nationale sont élus pour un mandat de cinq ans au suffrage universel direct. Les sénateurs ont un mandat de six ans.
Participation des citoyens aux affaires publiques hors élections
La pétition citoyenne est le principal vecteur de participation des Burkinabè aux affaires publiques hors élections. Dans le processus législatif, une disposition permet aux citoyens de soumettre une pétition signée par 15 000 personnes comme proposition de loi discutée au sein des deux chambres législatives. De plus, l’initiative de toute révision constitutionnelle appartient – outre au Président de la République et aux membres du Parlement – au peuple via une pétition signée par au moins 30 000 personnes ayant le droit de vote.
Références :
Titre I: Article 13
Titre II : Article 37
Titre IV : Article 153
Titre XIV : Articles 161-164
Organisation administrative
La Constitution reconnaît l’organisation du Burkina Faso en collectivités territoriales, créées et délimitées par la loi. En conséquence, le Burkina Faso est subdivisé en douze régions composées de 351 communes. Les modalités de la participation démocratique des citoyens à la libre administration de ces collectivités sont également déterminées par le Code général des collectivités territoriales adopté en 2004.
Références :
Titre VIII : Articles 124-136