La situation économique
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Bénin 2015
Daniel Ndoye, Économiste pays, Département régional Afrique de l’Ouest, Banque africaine de développement et El Hadji Mamadou Fall, Conseiller économique, Progamme des Nations unies pour le développement, African Economic Outlook
http://www.africaneconomicoutlook.org/fileadmin/uploads/aeo/2015/CN_data/Cn_Long_FR/Benin_2015.pdf
Extraits
La croissance économique est estimée en 2014 à 5,5 %, contre 5,6 % en 2013. Elle a été tirée par la production agricole et les services, deux secteurs qui pèsent plus de 85 % du PIB. La branche bâtiment et travaux publics (BTP) a été stimulée en 2014 par les investissements dans le transport et le tourisme. L’inflation a été négative en 2014 en raison, notamment, de la hausse de la production vivrière de la campagne 2013/14 et de la baisse des cours du pétrole depuis juin 2014. L’impact de la croissance sur la réduction de la pauvreté et des inégalités reste insuffisant, face à une forte croissance démographique.
Les perspectives économiques pour 2015 et 2016 s’inscrivent dans un contexte marqué par la volonté du gouvernement d’atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et la mise en œuvre du Programme d’investissements structurants (PIS). La croissance est projetée à 5,6 % en 2015 et à 6 % en 2016. Elle dépend de l’accélération des réformes visant à améliorer le climat des affaires et la chaîne de la dépense publique, notamment le système de passation des marchés publics.
Ces réformes visent à mobiliser les ressources annoncées lors de la table ronde qui s’est tenue en juin 2014 à Paris pour présenter le PIS, et ensuite exécuter les projets d’investissement. L’évolution politique et sociale sera aussi déterminante, compte tenu des échéances électorales de 2015 et 2016. À cet égard, il est important que le dialogue entre les acteurs politiques soit renforcé, pour parvenir à un consensus et à une organisation des élections respectant les dispositions de la Constitution.
La réduction des disparités régionales représente un défi pour le Bénin. Le développement équilibré et durable de l’espace national constitue l’un des cinq axes prioritaires de la Stratégie de croissance pour la réduction de la pauvreté (SCRP) en cours. La réduction de l’enclavement des zones de production, notamment agricoles, constitue un objectif important du Programme d ‘investissement sectoriel. Les autorités, pour achever leur politique d’inclusion spatiale, doivent promouvoir davantage les pôles d’activités régionaux et l’emploi dans les zones rurales, améliorer la gestion du rythme de l’urbanisation et travailler à la maîtrise de la croissance démographique.
Les perspectives économiques pour 2015 et 2016 s’inscrivent dans un contexte marqué par les efforts du gouvernement pour l’atteinte des Objectifs du millénaire pour le développe ment et la mise en œuvre du Programme d’investissement sectoriel soumis à la communauté financière internationale lors de la table ronde de juin 2014. L’année 2015 marque également l’entrée en vigueur du tarif extérieur commun (TEC) de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). La croissance devrait s’établir à 5,6 % en 2015 et 6 % en 2016 contre 5,5 % en 2014, grâce aux réformes visant à améliorer le climat des affaires et aux investissements prévus dans différents secteurs.
L’agriculture devrait bénéficier de la politique de diversification et de modernisation mise en œuvre dans le cadre du plan stratégique de relance du secteur adopté en 2012. La production de coton est projetée en hausse, grâce à la poursuite des incitations accordées aux producteurs (prix du coton-graine et des intrants), de la mise à disposition, en quantité suffisante et à bonne date, des intrants de qualité, et de l’amélioration des conditions de stockage.
Dans le secteur secondaire, l’industrie manufacturière devrait progresser avec l’augmentation de la production agricole 2014/15 et l’entrée en activité des nouvelles usines de transformation de produits vivriers ainsi que des unités de montage de tracteurs. Les exportations de la Nouvelle cimenterie du Bénin (Nocibe) vers les pays de la CEDEAO et le BTP devraient rester dynamiques. Les travaux de construction de routes et d’hôtels vont se poursuivre, tandis que la construction et réhabilitation du chemin de fer entre Cotonou et Niamey (Niger) va démarrer.
Le secteur tertiaire devrait tirer profit de la progression des activités dans le secteur primaire et secondaire ainsi que des efforts visant à moderniser l’administration douanière et le port de Cotonou.
Des risques pèsent toutefois sur ces perspectives en 2015 et 2016. L’évolution politique et sociale sera en effet déterminante pour réaliser les performances prévues. Or, les échéances électorales de 2015 et 2016 font l’objet de frictions entre les tenants du pouvoir, les partis d’opposition et la société civile.
Il est à craindre que le calendrier électoral ralentisse l’activité économique, de même que les différentes manifestions d’ordre politique et social qui ont démarré en 2014 (marches, et mouvements de grève) et qui pourraient se poursuivre en 2015 et 2016. Les dissensions entre le secteur public et le secteur privé, notamment dans la gestion de la filière coton, constituent un autre risque. D’où la nécessité, pour les autorités, d’arriver à un mode de gestion concerté de la filière.
Les perspectives pour 2015 et 2016 pourraient être affectées par l’impact de la baisse des cours du pétrole sur la croissance au Nigéria, principal destinataire des réexportations du Bénin. Par ailleurs, l’entrée en vigueur du TEC en 2015 pourrait se solder par une baisse de l’activité de réexportation vers le Nigéria voisin – un commerce alimenté par l’actuel différentiel de tarification. Il est essentiel que les autorités anticipent sur cette baisse et accélèrent leurs actions de promotion des cultures vivrières et de l’agro-industrie – des secteurs qui pourront bénéficier du marché ouest-africain élargi avec le TEC.
Extrait du communiqué de la Banque mondiale, rapport Doing Business 2016
Portail du gouvernement de la République du Bénin
Extraits
Le Bénin a enregistré cette année trois (03) réformes sur les indicateurs création d’entreprise, octroi de permis de construire et commerce transfrontalier. En effet, le pays a facilité la création d’entreprise, en réduisant les coûts de formalisation au niveau du Guichet Unique de Formalisation des Entreprises (GUFE). Le pays a aussi réduit la durée d’octroi du permis de construire, en créant un guichet unique à la mairie de Cotonou et en réduisant le nombre de paraphes sur les permis de construire.
Enfin, le Bénin a facilité le commerce transfrontalier, en développant davantage le système électronique de son guichet unique avec pour conséquence la réduction du temps nécessaire aussi bien pour les opérations d’importation que d’exportation. Les efforts du pays sont reconnus dans le rapport « Doing Business 2016 » puisqu’il est classé pour la deuxième fois consécutive parmi les 10 meilleurs réformateurs dans le monde.
Le rapport de cette année révèle le travail des deux dernières années d’élargissement significatif des indicateurs mesurant l’efficacité des règlementations des affaires, qui incluent le temps et coût pour être en règle avec toutes les réglementations gouvernementales, pour intégrer plus de mesures sur la qualité de la règlementation, reflétant mieux ainsi la réalité des opérations commerciales sur le terrain
Le Bénin en Afrique de l’Ouest : visions, défis et contraintes économiques
Abel Gbetoenonmon, Friedrich Ebert Stiftung, 2013
http://library.fes.de/pdf-files/bueros/benin/10691.pdf
Extraits
PIB et évolutions économiques des dix dernières années
En 2012, le produit intérieur brut (PIB) du Bénin a connu une croissance établie à 5,4% selon les statistiques officielles rendues publique par le Ministère de l’Economie et des Fiances en mars 2013. Ce niveau record de croissance fait suite à une décennie au cours de laquelle la croissance économique a oscillé autour de 4%. La période a été marquée par deux récessions profondes avec des taux de croissance très bas de 2,9% en 2005 et 2,6% en 2010.
En raison des réformes entamées par le Bénin, notamment au Port autonome de Cotonou, cette tendance à l’amélioration des performances économiques s’est maintenue en 2013 avec un taux de croissance estimé entre 5% et 5,5%. L’enjeu majeur de la gouvernance économique du Bénin est de parvenir à une croissance suffisante afin d’engendrer une réduction significative de la pauvreté.
Cela se realise, entre autres, à travers une agriculture plus diversifiée en développant plusieurs filières structurées et en intégrant les transformations agro-industrielles selon l’approche de chaînes de valeurs ajoutées. La relance de la croissance économique notée en 2012 s’est traduite au premier semestre de l’année 2013 par un regain d’activités économiques constaté à travers l’indice global du chiffre d’affaires (ICA global), essentiellement porté par le commerce, les services et les industries BTP (bâtiments et travaux publics).
Sur le plan de la stabilisation macroéconomique, la mission du Fonds monétaire international (FMI), lors de la cinquième revue du Programme économique et financier en août 2013, a confirmé le respect par le Bénin des repères convenus par les deux parties
Investissement et financement du développement
Le financement du développement au Bénin provient de plusieurs sources : l’épargne intérieure, l’aide publique au développement (APD), le financement bancaire, l’investissement direct étranger, les structures de financement décentralisées et les financements innovants. Au Bénin, l’épargne intérieure est très faible du fait de la faiblesse des revenus et des contraintes structurelles à sa collecte et à sa mobilisation.
Avec l’augmentation continue du coût de la vie et des revenus stables sur les dix dernières années, on assiste à un accroissement de la part de la consommation dans l’affectation des ressources au détrim nt de l’épargne. La faiblesse du taux d’épargne justifie la faiblesse des taux d’investissements productifs aussi bien publics que privés. En effet, le taux d’investissement sur la même période est de 17,2% en moyenne dont 6,0% pour l’investissement public.
De 2004 à 2013, le taux d’investissement (investissement global y compris sur ressources extérieures rapportées au PIB) tourne autour de 20% et s’établit à 19% en 2013.13 Lorsqu’on extrait les investissements sur ressources extérieures, les taux moyens d’investissement publics et privés tournent respectivement autour de 4,5% et 7,5%.
Bien que relativement modeste, l’aide publique au développement (APD) contribue dans une large mesure aux investissements sociaux. Mais au plan mondial, cette source de financement est tendanciellement en déclin depuis la décennie 90 du fait de son orientation vers les pays de l’Europe orientale et centrale, de la réforme de l’aide qui fait désormais de l’APD un substitut parfait aux investissements directs étrangers (IDE).
L’investissement direct étranger est la forme privilégiée de financement du développement. Sa mobilisation dépend de la capacité du pays à capter ses flux, c’est-à-dire son attractivité. L’attractivité du Bénin aux flux d’IDE est également faible. Cette situation s’explique en partie par l’environnement des affaires et le faible niveau de compétitivité de l’économie.
Les acteurs du secteur privé sont faiblement organisés en associations ou interprofessions. Les Institutions Consulaires, représentatives du secteur privé, notamment la Chambre de Commerce et d’Industrie du Bénin (relancée en 2014 avec l’élection d’un nouveau bureau après une léthargie de plus de cinq ans), la Chambre Nationale d’Agriculture et la Chambre Nationale des Métiers, n’ont pas encore atteint un niveau efficient d’organisation leur permettant de porter convenablement les intérêts vitaux du secteur privé dans son ensemble, et de servir de catalyseur pour la mobilisation des investissements étrangers.
Les entreprises de transformation et de service sont confrontées à plusieurs problèmes de compétitivité: (i) des lacunes dans la gestion de la qualité des produits/services et dans le respect des normes. Ce qui limite l’accès de leurs produits aux marchés nationaux, régionaux ou internationaux; (ii) un faible niveau de qualification de leur mains d’œuvre; (iii) des difficultés à définir leurs besoins mais aussi souvent à identifier et contacter des prestataires de services, des fournisseurs d’équipements ainsi que des clients et marchés; (iv) un accès limité et difficile aux financements de leurs investissements et fonctionnement; (v) une étroitesse de l’assiette fiscale qui augmente la charge fiscale des entreprises formelles et les harcèlements fiscaux; (vi) une faiblesse des structures de représentation de ces entreprises qui offrent peu de services à leurs membres et dont la capacité de négociation avec l’administration est limitée.
A ces contraintes à la compétitivité du secteur productif s’ajoute le manque de ressources humaines qualifiées adaptées aux besoins des entreprises. Le Bénin souffre d’un déficit dans le domaine de la formation continue correspondant aux besoins en compétences du secteur privé. Les structures de financement décentralisées sont majoritairement orientées vers l’informel et les microprojets, qui ne disposent pas des garanties nécessaires pour accéder au système bancaire.
La microfinance a pris de l’importance au cours des dernières années du fait de la forte implication du gouvernement à travers le «Programme de microcrédits aux plus pauvres» (MCPP). Pour améliorer le cadre et les instruments de financement du développement, il conviendrait à l’avenir: (i) d’approfondir les chantiers de financements innovants en procédant à leur spécialisation; (ii) de procéder aux réformes du système bancaire avec une spécialisation plus prononcée (agriculture, industrie, habitat, artisanat, agro-industrie et exportation); (iii) d’encourager la création de marchés et systèmes financiers inclusifs; (iv) de procéder des réformes touchant la politique et les instruments monétaires et le régime de change.
La monnaie doit être réorientée pour être au service de la transformation structurelle de l’économie par sa diversification productive et une spécialisation non extravertie. Le financement des investissements porteurs de développement demeure une problématique de la réforme monétaire et demande que l’on procède à l’adoption d’une architecture financière plus adaptée aux besoins de développement de l’économie.
Le système financier dans son fonctionnement actuel exclut de son champ la plus grande part des actifs: les produits offerts ne concernent qu’une partie du marché potentiel mettant à l’écart les producteurs ruraux, l’informel, les populations pauvres, etc. La problématique de la gouvernance monétaire sous-jacente à ces réformes doit intégrer la participation des citoyens, porter une attention sur le développement du secteur privé dans toutes ses dimensions pour assurer l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) et le développement humain. Une nouvelle architecture financière doit s’édifier pour servir de support au développement.
Elle doit pouvoir donner des réponses appropriées aux questionnements ci-après:
- Quelle stratégie et politique pour l’utilisation optimale des avantages de l’Union monétaire ?
- Quelle architecture financière et politique monétaire pourrait dans le contexte actuel assurer le financement de l’activité économique, les investissements productifs du plus grand nombre des actifs ?
- L’ancrage actuel du FCFA est-il favorable au développement de la zone ? Quelles leçons pourrait-on tirer des autres expériences ?
- Quelle stratégie pour la création d’un secteur financier inclusif, c’est-à-dire accessible à tous ?
- N’est-il pas pertinent de réinventer la stratégie de financement des investissements ?
S’agissant du régime monétaire et de change, on peut explorer plusieurs schémas alternatifs: (i) le maintien de l’ancrage à l’Euro avec une flexibilité de change; (ii) l’ancrage à l’Euro avec une convertibilité de marché et une flexibilité ajustable de change; (iii) la déconnexion de l’Euro et l’émission de monnaie régionale dans le cadre élargi de la CEDEAO (Eco) ou à l’échelle continentale dans le cadre de l’Union Africaine.
En conclusion, le financement du développement ne serait adapté et intégral, capable de générer des ressources nécessaires à la croissance et aux transformations économiques que s’il s’appuie sur une gouvernance économique crédible, un cadre monétaire et un marché financier non extraverti, soutenu par une monnaie propre régionale ou continentale.
Cette mutation de politique monétaire, nécessaire à une transformation structurelle de l’économie, exige une amélioration continue de la gouvernance avec le renforcement des capacités nationales et régionales de gestion des politiques économiques.
Credits Photo: Africardv