Ministère de la femme et de l’action sociale / Direction de l’équité et de l’égalité des genres
La Direction de l’Equité et de l’Egalité de genre (DEEG) a été créée par décret N° 2008-1045 du 15 septembre 2008 en vue d’offrir à la SNEEG un cadre institutionnel pour piloter sa mise en œuvre. Elle est fonctionnelle depuis l’année 2009. Au plan institutionnel, elle ressort du Ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfance.
Date de publication : 2016
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Facteurs socioculturels déterminant les rapports de genre
Au Sénégal, les relations et rapports entre femme et hommes sont déterminés et structurés par des déterminants socioculturels. Dès la naissance, les pratiques, comportements et attitudes des hommes et des femmes sont fortement dépendants des us et coutumes. Chacun agit et interagit en conformité avec les structures, systèmes et normes socialement établis. Ainsi, les femmes et les hommes, selon les âges et les milieux, adoptent des rôles et responsabilités sociaux attendus d’eux par la société en tant qu’acteurs sociaux culturellement déterminés.
Les normes et valeurs, qui se traduisent traditionnellement par une forte hiérarchie sociale et s’expriment d’abord dans la sphère familiale, varient au niveau des différents groupes ethniques que sont les Wolof, Hal Pulaar, Sereer, Diola, Mandingue, etc. A quelques exceptions ces différents groupes sont caractérisés, traditionnellement, par une forte hiérarchie sociale.
Les valeurs, socialement transmises et acquises, sont véhiculées en leur sein à travers des modes de socialisation dont les contenus sont transmis par des canaux impliquant les membres des groupes à travers les rites, cérémonies traditionnelles, pratiques comportementales, contes, adages et proverbes, etc. Organisées de manière à être véhiculé par les adultes et sages des communautés concernés, les normes et valeurs se transmettent entre les générations de manière à forger et perpétuer la personnalité de l’individu selon son sexe.
La famille est, pour l’essentiel des ethnies du Sénégal, l’institution de base à partir de laquelle s’organise principalement la vie sociale et culturelle. Malgré les diversités de croyance et pratiques, les différents groupes ethniques partagent la spécificité de la différenciation des rôles masculin et féminin et de la sanction inégale des statuts conférés aux hommes et aux femmes.
Les différentes cultures confèrent à l’homme et à la femme, partout au Sénégal, un traitement différent et une considération sociale inégale. Globalement, toutes les ethnies édifient les relations familiales entre les hommes et les femmes, à partir d’une inégalité fondamentale entre l’homme chef de famille et la femme qui doit, en effet, subir l’autorité de ce dernier. Ces statuts respectifs de base fondent les relations de pouvoir et d’autorité au sein de la famille entre femme et homme de manière générale, entre conjoints, parents et enfants, aînés et cadets.
Chacun agit et interagit en conformité avec les structures, systèmes et normes socialement établis. Ainsi, les femmes et les hommes, selon les âges et les milieux, adoptent des rôles et responsabilités sociaux attendus d’eux par la société en tant qu’acteurs sociaux culturellement déterminés
Dans ces systèmes sociaux dotés surtout d’une organisation de type patriarcal, la vie des ménages s’érige selon une culture valorisée de subordination des femmes et de domination de l’homme. Traditionnellement, l’homme qui incarne l’autorité au sein du ménage veille aux normes et règles sociales instaurées par la société et assure, à cet effet, le contrôle et la gestion des biens familiaux, prend les décisions capitales et a la charge de fournir les moyens de subsistance aux membres du ménage.
En l’absence de l’homme assurant le statut de chef de famille, il revient aux autres hommes d’assurer l’autorité familiale quel que soit l’âge des femmes présentes. La femme, mère, épouse ou sœur, a la charge sociale du fonctionnement de la vie domestique.
Elle assure, à cet effet, les travaux ménagers, prend soin des enfants et supporte la reproduction sociale de la main d’œuvre (agricole, salariée, etc.). Elle soutient et, parfois, se substitue à l’homme dans sa charge sociale de la famille. Elle prend en charge tout ce qui concourt à organiser les conditions favorables à la famille. La différenciation des rôles sociaux des hommes et des femmes et la vision de l’inégalité sociale entre ces catégories structurent leurs relations à tous les niveaux et dans tous les processus de la vie communautaire et sociale.
Pour les communautés, la famille étant le fondement de la vie sociale, la maternité est au centre de la vie familiale et communautaire. La fécondité est valorisée par les cultures ; la femme est sensée « donner des enfants au mari », à défaut, elle subit le rejet social. Le culte d’une fécondité élevée justifie la précocité du mariage et la prédominance de la polygamie.
Le rôle d’autorité assumé par l’homme et la position de subordination de la femme s’expriment dans les différentes institutions sociales et communautaires. Dans le mariage, acte social fondamental, l’homme détient le privilège du rôle actif, l’homme exerce, à titre principal et pour la majorité des groupes ethniques, un contrôle sur la fécondité du couple.
Dans les processus éducationnels familiaux et communautaires, il jouit d’un traitement spécial avec une plus grande permissivité et responsabilisation qui a tendance à s’estomper dans les zones où le taux d’analphabétisme est à la baisse. Par contre, les femmes, qui sont limitées et contrôlées dans leur ouverture et initiative, doivent respect et obéissance au niveau de toutes les communautés.
La violence alors inscrite dans cette relation comme moyen de sanction de toute désobéissance est une pratique courante que l’homme utilise, sous couvert du voile de la «sutura» ou de la discrétion imposé par l’ordre social, pour imposer à la femme le respect de son autorité et la soumission.
Les rôles et statuts, masculin et féminin, déterminent, à travers la division sexuelle du travail, la répartition des tâches entre les hommes et les femmes. Inscrite sur des modalités et systèmes de répartitions des responsabilités en terme d’activités de production, de reproduction et au niveau communautaire, la différenciation établie assigne aux hommes et femmes des travaux fondés sur l’ordre établi par la division du travail.
Dans le mariage, acte social fondamental, l’homme détient le privilège du rôle actif, l’homme exerce, à titre principal et pour la majorité des groupes ethniques, un contrôle sur la fécondité du couple
Dans ce cadre, les tâches dévolues aux hommes par exemple dans l’agriculture, la pêche, l’élevage peuvent varier selon les niveaux de disponibilités de la main œuvre et des équipements utilisés. Les femmes qui s’occupent et assurent l’essentiel des travaux de soins, plus pesants, répétitifs et fastidieux et nécessitant attention et soins, sont en première ligne pour tout ce qui concerne les enfants et personnes âgées notamment lorsque ces derniers sont malades. Elles organisent les activités communautaires (cérémonies familiales par exemple) qui incluent généralement des moments d’initiation ou de préparation de la jeune fille à son rôle d’épouse et de mère.
Dans le cadre de l’exécution de ces rôles et responsabilités, les hommes et les femmes ont des besoins et des moyens différents, mais aussi, des aspirations différentes quant à la satisfaction de leurs intérêts stratégiques. C’est seulement en fonction des rôles qui leur sont assignés qu’ils utilisent et contrôlent les ressources de base, accèdent aux bénéfices et services sociaux tels que l’éducation, la formation, la santé, etc.
Au niveau des espaces communautaires élargis, quartier et village, les hommes assument majoritairement des rôles de gestion des affaires publiques. Cependant, du fait de l’application de la loi sur la parité, les femmes prennent davantage part à la gestion des affaires publiques locales et nationales limitant alors le poids et les influences des hommes qui décidaient, principalement, de la répartition du patrimoine foncier familial et national et déterminait les modalités d’accès.
Les rôles sociaux sont traduits et perpétués à travers des stéréotypes qui en font les portraits imagés facilement intériorisés comme étant dévolus aux hommes et aux femmes en fonction de capacités féminines/masculines «normales» et «naturelles». Les stéréotypes établis, qui contribuent à servir de moyens de renforcement du niveau d’appropriation des responsabilités respectives, renvoient, pour l’essentiel et selon les contextes, à une image dévalorisante de la femme et, dans certains cas, à une image d’acceptation ou de rattrapage social venant moduler la première.
Les stéréotypes, richesse culturelle fièrement affichée, sont souvent confondus, à dessein ou inconsciemment, appuyés, sans fondement, à des sources religieuses. A travers les générations, ils gardent une force et un poids moral et psychologique qui influencent, dans bon nombre de communautés les relations de genre. Globalement, l’inégalité sociale dans les rôles des hommes et des femmes implique, au niveau socioéconomique, des disparités entre les hommes et les femmes.
Les différentes communautés et groupes ethniques sénégalais, en préparant différemment les hommes et les femmes, leur ont donné des opportunités différentes et conféré aux hommes un pouvoir et une autorité sur les femmes, les enfants et parfois sur les instances communautaires. Aussi, les sociétés ont-elles généré et institué une certaine masculinité de l’autorité qui oriente la vie socioculturelle et économique ; réduisant la femme, du fait de sa subordination à l’homme, ses chances d’exploitation réelle de leurs potentialités. Certes la société a également conçu des leviers de rééquilibrage, mais ceux-là restent secondaires et toujours positionnés en tant que moyens de perpétuation des inégalités défavorables aux femmes.